La déclaration de sinistre constitue la manifestation de la réalisation du risque couvert par le contrat d’assurance.

La déclaration de sinistre, obligation légale dont l’assuré est débiteur, engendre des conséquences importantes à son égard.

En effet et en cas d’omission ou de retard, sa responsabilité contractuelle est susceptible d’être engagée et, lorsqu’elle est conventionnellement prévue, la déchéance de sa garantie peut être prononcée par l’assureur.

L’assuré se trouve alors privé de son droit à indemnisation.

A titre liminaire, il faut rappeler que la déclaration de sinistre n’est soumise à aucune condition de forme et que son contenu n’est pas déterminé par le législateur, sauf dans certaines assurances obligatoires.

La déclaration par téléphone est ainsi parfaitement valable bien qu’elle constitue un risque évident pour l’assuré de ne pouvoir, en cas de litige avec son assureur, rapporter la preuve du respect de son obligation.

Il est dès lors vivement conseillé de procéder par voie de lettre recommandée avec accusé réception ou par remise en mains propres contre récépissé.

Précisons enfin que l’erreur commise par l’assuré dans la référence de la police ne dispense pas l’assureur de mettre en jeu la garantie dès lors que le risque est couvert par un autre contrat régulièrement souscrit (Cass. Civ.2ème, 20 décembre 2007, n° 07-10060) et que la clause qui impose à l’assuré le respect de condition de forme pour déclarer le sinistre sous peine de déchéance est sanctionnée par la nullité. (Cass Civ.1ère, 20 octobre 1992, n°90-18997)

Malgré cette absence de forme, la déclaration de sinistre est encadrée par des délais légaux.

Ainsi, aux termes de l’article L 113-2 4° du code des assurances, l’assuré est tenu de :

« De donner avis à l’assureur, dès qu’il en a eu connaissance et au plus tard dans le délai fixé par le contrat, de tout sinistre de nature à entraîner la garantie de l’assureur. Ce délai ne peut être inférieur à cinq jours ouvrés.

Ce délai minimal est ramené à deux jours ouvrés en cas de vol et à vingt-quatre heures en cas de mortalité du bétail.

Les délais ci-dessus peuvent être prolongés d’un commun accord entre les parties contractantes.

Lorsqu’elle est prévue par une clause du contrat, la déchéance pour déclaration tardive au regard des délais prévus au 3° et au 4° ci-dessus ne peut être opposée à l’assuré que si l’assureur établit que le retard dans la déclaration lui a causé un préjudice. Elle ne peut également être opposée dans tous les cas où le retard est dû à un cas fortuit ou de force majeure. »

La déchéance légalement prévue par ce texte n’est toutefois pas automatique et la jurisprudence est venue préciser les conditions de sa mise en œuvre, tant sur la forme que sur le fond.

1. La clause de déchéance doit être expressément stipulée dans le contrat et en caractères très apparents

L’assureur ne peut se prévaloir de la déchéance de garantie que si elle est expressément prévue dans la police d’assurance. (Cass.Civ.2 arrêt du 6 février 2014 n°13-11767)

Cette exigence est régulièrement rappelée par la Cour de Cassation. (Cass.Civ.2ème, 4 juillet 2019 n°18-18444)

Dans les faits de l’espèce, la Cour d’Appel de Fort de France a retenu la déchéance de garantie pour déclaration tardive au motif que :

 « …/Selon les dispositions de l’article L.113-2 du code des assurances, l’assuré est obligé de donner avis à l’assureur, dès qu’il en a eu connaissance et au plus tard dans le délai fixé par le contrat, de tout sinistre de nature à entraîner la garantie de l’assureur, ce délai ne pouvant être inférieur à cinq jours, constate qu’aux termes des deux polices d’assurance la déclaration de sinistre devait avoir lieu dans les cinq jours ouvrés de sa survenance et qu’il résulte de l’article L.113-2 du code des assurances que l’assureur ne peut valablement se prévaloir de la déchéance de garantie que s’il prouve que le retard dans la déclaration lui a causé un préjudice d’une importance suffisante, ce qui a été en l’espèce le cas ; »

La Cour de Cassation censure cet arrêt au visa de l’article L 113-2 4°du code des assurances au motif que la déchéance ne peut être prononcée que si les dispositions contractuelles le prévoient quand bien même l’assureur justifierait d’un préjudice.

En outre, la clause d’un contrat qui prévoit que la Compagnie d’Assurances a la faculté de réclamer à l’assuré réparation du dommage que peut lui causer un retard dans la déclaration de sinistre ne peut, sans dénaturer les termes clairs et précis de la police, valoir déchéance de garantie. (Cass.Civ.1ère 3 novembre 1982 n°81-15552)

La jurisprudence a toutefois assoupli sa position s’agissant de la place d’une telle clause dans le contrat.

Ainsi, et si initialement, elle exigeait qu’elle se situe dans le corps de la police, elle autorise désormais qu’elle puisse être présente dans les autres documents remis à l’assuré. (Cass.Civ 2 11 juin 2009 n°08-18778)

Enfin et bien que prévue au contrat, l’assureur ne pourra s’en prévaloir à l’encontre de son assuré, que si elle est mentionnée en caractère très apparents conformément aux dispositions prévues à l’article L 112-4 du code des assurances et ce afin d’attirer spécialement l’attention de l’assuré.

Cette exigence légale diffère de celle énoncée à l’article L 112-3 du même code qui prévoit que :

« Le contrat d’assurance et les informations transmises par l’assureur au souscripteur mentionnées dans le présent code sont rédigés par écrit, en français, en caractères apparents. »

Cette solution a été rappelée dans un arrêt du 30 janvier 1992 de la Chambre Criminelle :

« Mais attendu qu’en se bornant à relever que la clause litigieuse figurait en caractères apparents – ce qui est exigé de toutes les clauses d’une police d’assurance par l’article L. 112-3 du Code susmentionné – sans préciser si ces caractères étaient très apparents, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ; »

Ainsi, pour être valable, la clause de déchéance de garantie doit être rédigée avec des caractères permettant d’attirer spécialement l’attention de l’assuré, mais aussi être clairement différenciés de ceux utilisés dans des clauses voisines, n’entrant pas dans la catégorie de celles visées par le texte.

Tel n’est pas le cas d’une clause de déchéance rédigée avec des caractères identiques à ceux utilisés pour les articles voisins et sans mise en œuvre de moyen typographique telle que le caractère en gras ou surligné. (Cass.Civ.1ère 11 décembre 1990 n°89-15248) ou bien encore lorsque rédigée en gras, elle figure à côté d’autre clause d’exclusion rédigées en caractère rouge. (Cass. Civ.1ère, 1er déc. 1998, n° 96-18.993)

Tout en respectant les conditions de forme, la déchéance de garantie n’est recevable que si l’absence ou la tardiveté de la déclaration cause un préjudice à l’assureur.

2. La preuve d’un préjudice à la charge de l’assureur

S’il appartient à l’assuré de rapporter la preuve de l’existence de déclaration, c’est à l’assureur de démontrer le non respect du délai imposé. (Cass.Civ.1ère 27 avril 1994 n°94-10484)

L’assureur doit également rapporter la preuve d’un préjudice en lien avec le retard ou l’omission de déclaration :

« Prive sa décision de base légale, la cour d’appel qui, pour débouter la société assurée de sa demande formée à l’encontre de l’assureur retient que la déchéance de garantie est acquise en application de l’article L. 113-2, 4° du Code des assurances et de l’article 8-1 de la police qui prévoit que « l’assuré doit indiquer à l’assureur, dans un délai de dix jours ouvrés, tout événement de nature à faire jouer sa garantie. […] Toute déclaration tardive entraînera la déchéance de la garantie » en relevant qu’il n’est pas contesté qu’il n’a pas été fait de telle déclaration dans ce délai, sans constater que l’assureur démontrait que le retard apporté à la déclaration de sinistre lui avait causé un préjudice. » (Cass.Civ 2ème., 7 févr. 2019, n° 18-11939)

L’existence d’un préjudice pour l’assureur est retenue  lorsque la déclaration faite hors délai l’a empêché de diriger la procédure au mieux de ses intérêts en ne lui permettant pas de contester le principe et le montant de la demande formée par la victime contre son assuré.

Il en va différemment, lorsque la déclaration de sinistre intervient 4 ans après le dépôt de la première partie du rapport d’expertise dans la mesure où les instances au fond ont toutes faites l’objet d’un sursis à statuer et que l’assureur n’a pas été empêché d’intervenir à l’expertise. (Cass. 2e civ., 22 nov. 2012, n° 11-25056)

Autrement dit le préjudice sera caractérisé dès lors que l’assureur n’a pas été mesure de mettre en œuvre une expertise ou les mesures utiles à la conservation des preuves afin de préserver ses intérêts.

La seule exception admise par la jurisprudence est le cas de la déclaration frauduleuse de l’assuré sous réserve néanmoins que l’exagération frauduleuse du montant des dommages subis soit établie.

Les conditions de mise en œuvre de la déchéance de garantie sont donc strictement encadrées eu égard aux conséquences que cette sanction engendre pour l’assuré.

La déclaration tardive n’entraine pas automatiquement la perte du droit à garantie pour l’assuré qui doit rester vigilant.

Rappelons toutefois qu’en l’absence d’une telle clause contractuellement prévue dans le contrat d’assurance, l’assuré qui omet de déclarer son sinistre dans le délai légal est susceptible d’engager sa responsabilité qui se traduit le plus souvent par une compensation entre les dommages et intérêts alloués à l’assureur et l’indemnité qui lui est due sous réserve une fois encore que l’assureur rapporte la preuve d’un préjudice en lien avec le manquement de l’assuré à son obligation de déclaration.